Donner un second souffle au secteur de l'auto-école

Nous avons lancé Ornikar en 2014. Le chemin fut semé de toutes sortes d’embûches, car un nombre important d’acteurs, dont en première ligne les syndicats d’auto-écoles, ont tout fait pour que rien ne change. En effet, toutes les initiatives lancées dans l’optique de moderniser l’apprentissage de la conduite en France n’ont pas reçu un bon accueil. Pourtant, notre objectif et celui de nos partenaires a toujours le même : donner un second souffle au secteur de l'auto-école 

Pourquoi la modernisation du secteur de l’auto-école était-elle essentielle ?

Au premier trimestre 2017, le secteur a connu une augmentation du nombre de dépôts de bilan de 37% par rapport au premier trimestre 2016. La faute d’Ornikar vous diront nos détracteurs, soucieux de désigner un ennemi facile pour récolter de nouveaux adhérents. La réalité : 90% de ces dépôts de bilan ont eu lieu dans des géographies où Ornikar n’est pas présent.

Le secteur était à bout de souffle

La réalité c'est que le secteur de l’enseignement de la conduite en France est à bout de souffle. La faiblesse des marges détruit les entreprises et sacrifie toute ambition de véritable politique de sécurité routière. Les auto-écoles font face à des charges élevées : une TVA à 20%, des véhicules, un loyer pour un local obligatoire, le carburant, les salaires du personnel enseignant et éventuellement les salaires du personnel administratif.

De l’autre côté, le pouvoir d’achat des Français se réduit et de nombreuses familles ne peuvent plus consacrer la somme nécessaire à l’obtention du permis de conduire. Le permis est-il cher ? Non, si l’on considère le montant des charges auxquelles font face les auto-écoles. Mais, oui si l’on fait preuve d’un peu d’empathie vis-à-vis de nos concitoyens. Il suffit de regarder le salaire moyen en France et les chiffres du pouvoir d’achat des jeunes. Personne ne peut dépenser sereinement 1600€ dans l’obtention du permis sans y réfléchir à deux fois.

C’est ce ciseau mortifère qui tue la profession : d’un côté des coûts importants pour délivrer la prestation et de l’autre des candidats qui souhaitent, et cela est plus que légitime, ne pas se ruiner pour avoir le droit de conduire.

Mais ce n’est pas tout, les auto-écoles sont encore pénalisées au-delà de cette réalité économique. Une stratégie que les auto-écoles pourraient adopter est celle de la croissance. En grossissant, des économies d’échelle sur les coûts seraient possibles, les marges pourraient se rétablir, permettant aux auto-écoles de survivre. Cependant la croissance est impossible, car le système défaillant du passage de l’examen pratique, avec sa pénurie d’inspecteurs, condamne les auto-écoles à rester des petites structures. Ces petites entreprises doivent survivre grâce aux avances de trésorerie à défaut d’être des entreprises profitables. Comment former plus de candidats si on ne m’attribue que 5 places d’examen par mois ?

C’est un gâchis pour tous les passionnés de l’éducation routière qui voudraient pouvoir gagner leur vie dignement.

Pour être totalement objectif, les gérants des auto-écoles ne sont pas les seules victimes de ce modèle économique à bout de souffle plombé par un système absurde.

Les enseignants de la conduite, principales victimes d’un modèle économique usé

Les enseignants de la conduite en sont également les grandes victimes, probablement ceux qui souffrent le plus de la situation.

Certains gérants s’en sortent en effet très bien : ils maintiennent des prix hauts et font en sorte que les élèves fassent un maximum d’heures de conduite avant de passer l’examen. Du côté des coûts, ces gérants prospèrent en maintenant les charges de leur auto-école au niveau le plus bas possible, à commencer par les salaires de leurs enseignants de la conduite. Vous comprenez ici pourquoi cette profession d’enseignant de la conduite est, dans l’état actuel, sacrifié et sans aucune perspective.

Comment justifier deux ans de formation pour obtenir le diplôme d’enseignant de la conduite, pour un coût total de formation souvent supérieur à 6000 €, si la seule perspective que nous pouvons leur offrir est une rémunération au niveau du plancher ad vitam aeternam ? Ou alternativement des rémunérations non déclarées généralisées, les condamnant à ne pas cotiser ni à sécurité sociale ni pour leurs retraites. Comment pouvons-nous avoir de l’ambition pour la sécurité routière et pour la formation des futurs conducteurs, en acceptant des conditions indignes pour les enseignants de la conduite ? Par exemple, en leur demandant d’effectuer toujours plus d’heures de conduite pour « faire du chiffre » au détriment de la qualité de la formation ?

Le métier d’enseignant de la conduite demande rigueur, discipline et attention de tous les instants. C’est un métier noble : 7 heures de cours individuels en voiture chaque jour pour être payé au SMIC ou non déclarées ? De qui se moque-t-on ?

Hélas, il s’agit d’une triste réalité, la plupart des gérants d’auto-école ne peuvent pas vraiment faire autrement, car comme nous venons de l’écrire, ils font face à des marges quasi nulles et à l’absence de perspective de croissance, à cause du bouchon de l’examen.

Ce qui a changé dans le secteur de l’auto-école

Il était urgent de réformer le système de l’examen pratique pour faire sauter ce « bouchon », qui constituait la racine du mal du secteur. La dernière réforme de l’examen du Code de la route a ouverte la voie à une nouvelle ère. Espérons que cela ne soit pas freiné pour de mauvaises raisons.

Maintenant, il est urgent enfin de faire baisser la TVA pour les auto-écoles et les indépendants, afin d’aligner le statut fiscal de ce secteur sur celui les autres activités d’enseignement. Véritable opportunité de second souffle, cette mesure donnera un bol d’air frais à l’ensemble de la profession.

Avec d’autres, nous nous battons depuis 5 ans pour faire émerger un nouveau paradigme de l’enseignement de la conduite en France. Tous nos outils sont désormais disponibles gratuitement pour les auto-écoles qui souhaitent moderniser leur façon de travailler. Notre ambition est d’apporter des solutions pour, qu’ensemble, nous gagnons la bataille de la modernisation de l’auto-école. Pour nos jeunes d’abord, et pour tous les passionnés qui les forment chaque jour à devenir des conducteurs responsables.

Que faire alors pour continuer à donner un second souffle au secteur de l'auto-école ?

Encore aujourd’hui, la meilleure solution demeure une réforme d’ampleur, aussi bien économique que politique, pour donner un second souffle au secteur de l’enseignement de la conduite et de la sécurité routière. Tout d’abord, pour sauver nos ambitions pédagogiques, il est urgent de reconnaître que les vrais professionnels de l’enseignement de la conduite sont : les enseignants eux-mêmes. Aussi, il est donc urgent favoriser l’exercice de leur métier en tant qu’indépendant et d’admettre qu’un local n’est pas nécessaire pour apprendre à conduire. De plus, cela permet de limiter les charges à l’origine de l’asphyxie des auto-écoles, et donc de limiter la paupérisation du métier d’enseignant de la conduite.

Après plusieurs années d’exercice, Ornikar est toujours debout et ne s’est jamais aussi bien porté. Avec plus de 1 000 enseignants partenaires, nous sommes présents dans plus de 500 villes françaises, dont la totalité des grandes agglomérations. Avec 1 500 nouveaux élèves s’inscrivent au Code de la route avec Ornikar chaque semaine et une centaine d’enseignants postulent chaque mois pour rejoindre le réseau, cette montée en puissance n’est pas prête de s’arrêter.

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